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La géographie sacrée 2 : le centre.

Après avoir abordé de manière générale la géographie sacrée avec la théorie des cinq royaumes chinois, nous devons prendre chacun de ses éléments séparément pour entrer dans le détail.

Nous avons vu que la Chine accorde une place particulièrement importante au Centre. Comme son nom l’indique, c’est l’élément central du monde et le pivot de la géographie sacrée. Plus tard, les Grecs parleront d’omphalos et les Romains d’axis mundis.

Je propose d’étudier la notion de centre dans la géographie sacrée à travers l’étude de plusieurs centres à travers l’histoire, me concentrant sur l’Europe et le Moyen-Orient. Il en existe d’autres, mais nous n’en parlerons pas. Nous verrons dans un premier temps, Delphes (I), pour ensuite voir Délos (II), Sardes (III), Mélitène (IV) et enfin Hébron (V). Le centre est un endroit qui concentre une force énergétique que chaque civilisation doit contrôler pour devenir une grande puissance.

I : Delphes.

L’omphalos de Delphes est le plus célèbre centre du monde. Il est donc tout naturel de commencer par cette cité.

Le géographe Strabon décrit l’omphalos de Delphes de cette manière :

« On peut voir aujourd’hui encore dans le temple de Delphes l’image grossière d’un nombril entourée de bandelettes et surmontée de ce double emblème dont parle la Fable. » (Strabon, Géographie, IX, 3, 6).

L’omphalos est le nombril de la terre, selon Pausanias.

« Ce que les Delphiens nomment le nombril est en marbre blanc ; c’est, à ce qu’ils prétendent, le milieu de la terre. » (Pausanias, Géographie, IX, XVI, 3).

Ce nombril se compose de deux éléments : l’omphalos en lui-même et son agrénon.

On le retrouve au cœur de l’intrigue de la pièce de théâtre d’Euripide « Ion ». L’action se déroule devant la Pythie.

« LE CHŒUR : Dis-moi, toi qui te tiens devant ce ce temple ; pouvons-nous franchir, pieds nus, cette limite ?

ION : Non, étrangères !

LE CHŒUR : Ne peux-tu pas nous donner un renseignement ?

ION : Parle : que veux-tu savoir ?

LE CHŒUR : Est-ce que le temple de Phoibos recèle vraiment le nombril du monde ?

ION : Il est couvert de bandelettes, entouré de Gorgones.

LE CHŒUR : C’est ce qu’on dit.

ION : Si vous avez déposé le gâteau rituel devant le temple, et désirez poser une question à Phoibos, Approchez-vous des autels, mais n’entrez pas À l’intérieur sans avoir sacrifié des brebis. » (Euripide, Ion, 224).

Il est en forme d’œuf. Il est recouvert d’un réseau de cordelette en laine avec des nœuds que l’on appelle agrénon. Agrénon se traduit par le filet. Il est l’expression d’un réseau tellurique (A) dont le centre est à Delphes (B).

L’omphalos de Delphes.

A. L’agrénon et les réseaux telluriques.

Nous retrouvons trace d’un réseau tellurique dans la tradition sumérienne (1) avant que la science moderne ne le redécouvre (2).

1. Le réseau tellurique à Sumer.

Dans l’Enuma Elish nous retrouvons la description d’un filet qui enveloppe le monde.

Pour consolider la Terre,

Son œuvre ainsi parachevée,

Il équilibra à l’intérieur de Tiamat ;

Puis, déployant son filet,

Il le développa de toutes parts,

Formant ainsi une enveloppe

Pour le Ciel et la Terre,

Et assurant parfaitement

(…) leur cohésion.”

(Jean Botéro, Lorsque les dieux faisaient l’homme, p. 633-634).

Certaines divinités sumériennes sont représentées avec une pomme de pin dans une main et une « situle » dans l’autre. Il plongeait la pomme de pin dans l’eau bénite et aspergeait les gens pour les bénirent.

Génie tétraptère tenant une situle et une pomme de pin (ou apkalu) Korsaba albatre gypseux dit aussi marbre de mossoul h 3,06m l 2, 14m epoque néo-assyrienne règne de Sargon II (721-705av.J.-C.) conservé au Louvre.

La forme de la pomme de pin fait penser à un omphalos. D’abord, par sa forme ovale comme un œuf. Ensuite, par sa surface qui correspond à une sorte d’agrénon. Ce sont des bosses qui se croient et s’entrecroise. Une structure classique que l’on retrouvera dans tout les omphalos et les objets qui lui sont associés.

Curieusement, le modèle sumérien de l’omphalos va se retrouver dans le christianisme.

D’abord, une pomme de pin géante se trouve au Vatican dans la cour de la Pigna. C’est en quelques sortes l’omphalos de la Rome chrétienne. Ce qui fait de Rome un centre au même titre que ceux que nous citerons.

Sculpture de la cour de la Pigna, Vatican.

Nous avons également la statue de la Vierge au Christ, où Jésus tient une pomme de pin dans les mains. On parle alors de Vierge à la pomme de pin. Le Christ et la sainte-Vierge jouant alors le rôle d’omphalos.

La Vierge de la pomme de pin d’Aznalcázar, aujourd’hui disparue. Photographie José María González-Nandín y Paul (1929).

2. Les réseaux telluriques modernes.

La science a découvert en plusieurs étapes l’existence de l’agrénon. Il y a d’abord les découvertes d’Hartmann (1), puis de Curry (2) et enfin celle de l’existence des courants magnétiques (3).

a. Le réseau Hartmann.

Les recherches du docteur Hartmann vont mettre en évidence l’influence du champ magnétique.

En 1935, Ernst Hartmann, alors étudiant en médecine à l’université d’Heidelberg comprend que le monde est parcouru par un quadrillage de courant tellurique. Il aurait observé qu’en fonction de la position du lit du malade dans l’hôpital, celui-ci avait plus de chance de guérir. Après avoir déplacé les lits et les malades, il pensa que ce n’était pas le lit qui permettait de se soigner, mais l’emplacement.

C’est ce que l’on appelle la géobiologie, c’est-à-dire l’étude champs magnétiques et électriques qui parcourent le sol en raison de la circulation et des accumulations d’eau souterraines, des filons métalliques sous-terrains ou des poches d’air.

Le matérialisme ambiant nous explique à grand renfort d’argument que la géobiologie n’est pas une science et qu’il n’y a pas de courant tellurique sous-terrain. Etrange, que le matérialisme moderne mette autant d’énergie à discréditer une évidence désormais incontestable.

Dans la pensée chinoise, le champ magnétique terrestre est appelé « qi« . C’est le souffle vital qui parcourt la terre, qui met en mouvement le ying, le yang et les éléments (cinq pour la Chine ou quatre en occident). L’alternance du ying et du yang, c’est le tao.

Tao.

Nous avons vu dans quelle condition le docteur Ernst Hartmann a découvert l’existence de ce réseau énergétique. Il est orienté selon le pôle magnétique dans les axes Est-Ouest et Nord-Sud. Avec son frère physicien, il va établir une description précise de ce réseau. Ils ont découvert qu’il était composé de bandes d’énergie d’environ vingt et un centimètre d’épaisseurs. Les lignes sont espacées de deux mètres dans le sens Nord-Sud et de deux mètres cinquante dans le sens Est-Ouest.
Le réseau est organisé selon une base de valeur sept. Toutes les sept lignes de niveau 1, il y a une double ligne dite niveau 2. Lorsque deux lignes doubles se croisent, la négativité est au maximum.

Le reseau Hartmann.

Le réseau Hartmann n’est mesurable qu’avec des outils radiesthésiques, tel le pendule ou la baguette de coudrier.

Un épisode célèbre de l’Ancien Testament montre Moïse avec son bâton de sourcier pour donner de l’eau à son peuple :

« Toute l’assemblée des enfants d’Israël partit du désert de Sin, selon les marches que Yahvé lui ordonnait, et ils campèrent à Raphidim, où le peuple ne trouva point d’eau à boire. Alors le peuple chercha querelle à Moïse, en disant : « Donnez-nous de l’eau à boire. » Moïse leur répondit : « Pourquoi me cherchez-vous querelle ? Pourquoi tentez-vous Yahvé ? » Et le peuple était là, pressé par la soif, et il murmurait contre Moïse ; il disait : « Pourquoi nous as-tu fait monter hors d’Egypte, pour nous faire mourir de soif avec mes enfants et mes troupeaux ? » Moïse cria vers Yahvé, en disant : « Que ferai-je pour ce peuple ? Encore un peu, et ils me lapideront ! » Yahvé dit à Moïse : « Passe devant le peuple et prends avec toi des anciens d’Israël ; prends aussi dans ta main ton bâton, avec lequel tu as frappé le fleuve, et va. Voici, je me tiendrai devant toi sur le rocher qui est en Horeb ; tu frapperas le rocher, et il en sortira de l’eau, et le peuple boira. » Moïse fit ainsi en présence des anciens d’Israël. Et il donna à ce lieu le nom de Massah et Méribah, parce que les enfants d’Israël avaient contesté, et parce qu’ils avaient tenté Yahvé en disant : « Yahvé est-il au milieu de nous, ou non ?«  » (Exode, XVII : 1-7).

A ce jour aucun outil scientifique n’a pu enregistrer l’existence de ce réseau. Cela ne signifie pas qu’il n’existe pas. Il s’agit sans doute d’une science encore inaccessible avec nos connaissances scientifiques actuelles.

b. Le réseau Curry.

Le réseau Curry a été découvert par le docteur Manfred Curry, en 1952. Il était médecin et navigateur ayant participé à plusieurs Jeux olympiques. Il rédigera un manuel de tactique de course à la voile considéré comme une référence. Il travaillera en soufflerie pour produire la meilleure coque de bateau possible. Sa contribution a l’ingénierie des voiliers sera considérable. Il remporta mille courses sur les mille quatre cents auxquelles il participa. Le monsieur n’est donc pas n’importe qui. C’est lui qui découvrit un réseau de force tellurique, dont il observa les effets sur les enfants victimes d’allergie.

A la différence du réseau d’Hartmann, celui de Curry est orienté en diagonale selon l’axe Nord-Est Sud-Ouest et Nord-Ouest Sud-Est, avec une inclinaison de 45°. Chaque bande d’énergie est de quarante centimètres. L’espacement est variable entre trois et huit mètres. L’orientation correspond au coucher et au lever du Soleil. L’orientation Nord-Est, c’est l’axe du levant et du couchant en été. L’orientation Nord-Ouest, c’est l’axe du levant et du couchant en hiver.

Le reseau Curry.
c. Les courants magnétiques terrestres.

Selon la théorie scientifique classique, le noyau de la Terre est composé de métaux en fusion, du nickel et du fer. Il fonctionne comme une dynamo en s’auto-alimentant. Cela produit un rayonnement à la surface de la terre que l’on peut mesurer avec des appareils. Il n’y a donc pas de doute à avoir concernant son existence contrairement à ce que nous explique la doxa scientifique.

Champ magnétique terrestre en juin 2014.

La perception du pôle Nord par une boussole est la première preuve scientifique de son existence. Il est connu des Chinois depuis plusieurs millénaires. C’est le « luo pan » qui sert pour mesurer le « qi » dans le « feng shui » chinois. Je l’utilise moi-même depuis des années. Elle permet de mesurer la direction du champ magnétique, en direction du pôle Nord magnétique.

En revanche le « luo pan » est impuissant pour calculer l’intensité du champ magnétique. Pour cela, il faut utiliser un outil moderne qui va mesurer le niveau de micro-tesla. Certaines applications sur smartphone peuvent le faire très facilement si celui est doté d’un capteur.

Le dipôle terrestre.

Le magnétisme terrestre influencerait le comportement des animaux migrateurs aériens ou maritimes. Ils peuvent percevoir le champ magnétique afin d’être guidés dans leurs migrations. C’est la magnéto réception. Des fragments de magnétites sont présents dans leurs cerveaux, comme chez les humains. La magnétite est un aimant qui réagit en présence d’un champ magnétique, comme une boussole. C’est par cette intermédiaire qu’ils peuvent capter les champs magnétiques et les utiliser pour voyager.

B. Delphes : centre de la Grèce.

L’omphalos de Delphes se trouvait à l’intérieur du temple où la pythie donnait ses oracles. Il était considéré comme le centre du monde. L’agrénon qui le recouvre est la représentation du réseau énergétique qui parcourt la terre. Celui-ci est représenté en diagonale ce qui le rapproche du modèle de Curry.

Si on étudie attentivement l’agrénon de Delphes, on observe différents réseaux de taille variable qui se superpose, avec des nœuds plus grands que d’autres. Cela montre qu’il y avait des centres de différentes tailles et de différentes importances en matière d’énergie tellurique.

Delphes a été choisi comme centre de la Grèce par Zeus. Il installa deux aigles (ou corbeaux) aux deux extrémités du pays.

« De là aussi cette fable, qu’on lit dans Pindare, de deux aigles (d’autres disent de deux corbeaux) que Jupiter aurait fait partir en même temps l’un de l’Occident et l’autre de l’Orient, et qui se seraient rencontrés juste en ce lieu. On peut voir aujourd’hui encore dans le temple de Delphes l’image grossière d’un nombril entourée de bandelettes et surmontée de ce double emblème dont parle la Fable. » (Strabon, Géographie, IX, III, 6).

Le premier volatile se trouvait l’Occident et l’autre à l’Orient. Ils se rencontrèrent à Delphes.

L’aigle qui fit son départ de l’Orient, le fit depuis Délos.

L’aigle qui partit de l’Occident prit son départ depuis Dodone.

Delphes est le centre le plus puissant de la Grèce en raison de la présence de la Pythie. Le lieu était gardé par un serpent, du nom de Python. Thémis (la déesse de la justice) se servait de l’endroit pour consulter un oracle.

« Apollon, quant à lui, apprit l’art de la prophétie de Pan, le fils de Zeus et de Timbréos, et il se rendit à Delphes, où, à cette époque, Thémis rendait des oracles. Mais le serpent Python, qui gardait l’oracle, l’empêcha de s’approcher des fissures par lesquelles s’exhalaient les prophéties : alors Apollon le tua, et il se rendit maître de l’oracle. » (Apollodore, la bibliothèque, Livre I, chapitre IV, 1).

Apollon tua le serpent et s’empara de l’oracle qui devint sous sa protection la Pythie, en hommage au python. Le serpent représente l’énergie primordiale du monde, son champ magnétique. Tuer le serpent, c’est prendre le contrôle de cette énergie négative pour la transformer en énergie positive.

Puis la pythie de Delphes tomba en ruine abandonnée de tous.

« Aujourd’hui le temple de Delphes lui-même est passablement négligé, mais anciennement [il était l’objet d’hommages et de respects] infinis : c’est ce que prouvent, d’une part, ces trésors que peuples et souverains à l’envi y avaient fait construire pour recevoir leurs pieuses offrandes, lingots d’or et d’argent, chefs-d’oeuvre des plus éminents artistes, etc., et d’autre part cette solennité des jeux pythiques et ce grand nombre d’oracles dont l’histoire a conservé le souvenir. » (Strabon, Géographie, IX, 3, 4).

II : Délos.

Délos est un centre d’une particulière importance dans la civilisation grecque, en raison de sa situation géographique (A) et de son importance mythologique (B).

A. Situation géographique de Délos.

Délos est une minuscule île, de trois kilomètres et demi carré, entre la Grèce et l’Asie mineure.

Elle fait partie de l’archipel des Cyclades.

Délos est le centre des Cyclades.

« Les dernières îles que nous venons de nommer sont toutes dans la mer de Crète, mais c’est à la mer Egée plutôt qu’appartiennent Délos et le groupe des Cyclades dont Délos est le centre. A l’origine, dit Pindare, Délos flottait sur la mer, emportée par les vagues, poussée en tout sens par les vents ; mais à peine la fille de Coeus, pressée par les vives douleurs de l’enfantement, y eut-elle posé le pied, que des entrailles de la terre surgirent quatre immenses colonnes, qui, appuyées sur leurs fûts de diamant, servirent à leur tour de supports au rocher fixé pour jamais. Et Latone, devenue mère, put contempler en paix l’heureux fruit de ses amours» » (Strabon, Géographie, X, 5, 1-2).

Les Cyclades se composaient de douze îles.

« On pense qu’originairement le groupe des Cyclades se composait de douze îles ; mais on y a fait entrer depuis quelques îles de plus. Ainsi Artémidore en énumère [quinze]. Voici le passage : il suit immédiatement la description d’Héléné. Artémidore vient de dire que cette île, de forme allongée, commence à la hauteur de Thoricum et s’étend jusqu’à Sunium, mesurant dans le sens de sa longueur 60 stades environ, il ajoute : « Passé Héléné, on atteint les îles comprises sous la dénomination commune de Cyclades». Puis il nomme Céos comme étant apparemment la plus rapprochée d’Héléné, et, après Céos, Cythnos, Sériphos, Mélos, Siphnos, Cimolos, Prépésinthos, Oliaros ; plus Paros, Naxos, Syros, Myconos, Ténos, Andros et Gyaros.

Or je retrouve bien, dans l’énumération d’Artémidore, les douze Cyclades proprement dites, mais j’hésite à étendre ce nom à Prépésinthos, à Oliaros, à Gyaros. ». (Strabon, Géographie, X, 5, 3).

La ligue de Délos organisait à des dates fixes de grandes assemblées composées d’un ambassadeur sacré par île.

« Ce qui contribua aussi beaucoup à rendre le nom de Délos illustre fut le voisinage des Cyclades et la pieuse habitude prise de bonne heure par les populations de ces îles d’envoyer à frais communs dans Délos des théories ou ambassades sacrées, des hécatombes, des chœurs de jeunes filles et d’y tenir à époques fixes de grandes et solennelles assemblées. » (Strabon, Géographie, X, 5, 2).

B. Importance mythologique de Délos.

Délos occupe une place particulière dans la culture grecque, car c’est là que sont née Apollon et Artémis (1), de même Délos est le centre de la Grèce (2).

1. Apollon et Artémis.

« A Délos, la ville, le temple d’Apollon, et le Létoum ou temple de Latone sont bâtis dans la plaine. Mais juste au-dessus de la ville s’élève le Cynthe, montagne d’un aspect âpre et nu. Un cours d’eau traverse toute l’île, il se nomme l’Inopus et est naturellement peu étendu, l’île étant elle-même très petite. [Telle qu’elle est], cette île s’est vue, de toute antiquité, voire depuis les temps héroïques, l’objet d’une vénération particulière, à cause d’Apollon et de Diane. C’est à Délos, en effet, que la Fable place la délivrance de Latone et la double naissance de Diane et d’Apollon. » (Strabon, Géographie, X, 5, 2)

L’île a vu naître Apollon et Artémis (Diane en latin). Léto (Latone en latin), la mère des deux enfants, fut séduite par Zeus. Jalouse de son infidélité, sa femme légitime, Héra, poursuivi la jeune femme encore enceinte à travers la Grèce. Elle trouva refuge sur la petite île de Délos où elle donna naissance aux deux enfants.

Léto disposait d’un temple en son honneur à proximité de celui dédié à Apollon.

L’île n’est plus aujourd’hui qu’un champ de ruines. Elle ne donne qu’une image partielle de l’immense prestige de Délos sous l’antiquité. Un des endroits les plus sacrés du monde antique, à tel point qu’il était interdit d’y naître ou d’y mourir.

Apollon et son culte justifie une telle dévotion. Le dieu est un personnage central de la géographie sacrée avec Artémis. Nous avons déjà vu le rôle d’Apollon dans la création de la pythie. Nous verrons ultérieurement, le rôle d’Apollon et d’Artémis dans les autres centres en Asie mineure.

2. Les quatre colonnes.

Selon Strabon, lors de la naissance d’Apollon et d’Artémis sur l’île de Délos, quatre colonnes sont sorties de la terre.

« A l’origine, dit Pindare, Délos flottait sur la mer, emportée par les vagues, poussée en tout sens par les vents ; mais à peine la fille de Coeus, pressée par les vives douleurs de l’enfantement, y eut-elle posé le pied, que des entrailles de la terre surgirent quatre immenses colonnes, qui, appuyées sur leurs fûts de diamant, servirent à leur tour de supports au rocher fixé pour jamais. Et Latone, devenue mère, put contempler en paix l’heureux fruit de ses amours. » (Strabon, Géographie, X, 5, 2)

Les quatre colonnes ont surgi des entrailles de la terre lors de l’accouchement de Léto. Cela montre bien leur origine chthonienne. Ce sont des forces primordiales de la terre.

Les quatre colonnes représentent les quatre extrémités du carré sacré dont le centre est Délos. Nous avons Delphes au Nord-Ouest, Sardes au Nord-Est, Camiros sur l’île de Rhodes au Sud-Est et le cap Ténare au Sud-Ouest.

III : Sardes.

Sardes est un centre de la géographie sacré grec se situant en Asie mineure (A) où Héraclès joue un rôle particulier auprès de la reine Omphale (B).

A. Situation géographique de Sardes.

Sardes était un centre important à l’Ouest de l’Asie mineure (1) qui prit naissance par la mort du géant Typhon et donne une place importante à Artémis (2).

1. Un centre situé à l’Ouest de l’Asie Mineure.

Sardes était un centre plus ancien que Délos ou Delphes. C’est ce que relate Strabon.

« Sardes a l’aspect d’une grande ville. Fondée postérieurement à la guerre de Troie, elle est cependant fort ancienne. Elle possède une citadelle ou acropole très forte et a servi longtemps de résidence aux rois des Lydiens, des Mêones, pour dire comme Homère. » (Strabon, Géographie, XIII, 4, 5).

Sardes était une cité grecque en Asie Mineure. Elle se trouvait à l’Ouest et s’opposait à Mélitène qui se trouvait à l’Est de l’Asie Mineure. Ce sont les deux pôle de la géographie sacrée en Asie mineure. Elle formait un triangle sacré avec la ville de Chersonèse en Crimée.

2. Artémis et le géant Typhon.

Sardes aurait été une grande ville construite après la guerre de Troie. Elle disposait d’une acropole, c’est-à-dire d’une forteresse installée en haut et au centre, regroupant plusieurs temples dédiés aux dieux de l’Olympe, dont un temple à Artémis. Elle était la sœur jumelle d’Apollon née elle aussi à Délos, comme nous l’avons vu.

Selon Homère, dans l’Illiade, l’Acropole de Sardes aurait été construite sur le corps endormi du géant Typhon.

« L’armée s’avançait donc en ordre de bataille. A l’éclat de ses armes, on l’aurait prise pour un embrasement qui ravageait la plaine ; la terre retentissait sous leurs pieds, comme lorsque Jupiter irrité lance ses foudres sur le mont qui couvre Tiphoeus dans le pays des Arimes, où l’on dit qu’est le tombeau de ce géant ; la terre retentissait avec le même bruit sous cette formidable armée, qui s’avançait contre Ilion. » (Homère, l’Illiade, chant II).

La terre des Arimes était située dans la région d’Hyda proche de Sardes. Comme pour le serpent, le géant signifie les forces primitives de la terre qu’il faut tuer pour prendre le contrôle de l’énergie de la terre. C’est une constante que nous rêverons souvent dans la suite. Le serpent (et son variant le dragon) comme le géant marquent à coup sûr la présence d’un centre de la géographie sacré.

B. Héraclès et la reine Omphale.

Héraclès tomba malade après le meurtre d’Iphitus, il alla consulter l’oracle de Delphes.

« Attaqué d’une maladie très grave, en punition du meurtre d’Iphitus, il alla consulter l’oracle de Delphes, pour savoir comment il en guérirait. La Pythie ayant refusé de lui répondre, il entreprit de piller le temple, et ayant emporté le trépied, il se fit un oracle particulier. Apollon en étant venu aux mains avec lui. Jupiter lança la foudre au milieu d’eux, et les sépara. Apollon rendit ensuite un oracle à Hercule, et lui dit que sa maladie cesserait lorsqu’après avoir été vendu comme esclave, et avoir donné à Eurytus le produit de cette vente, en indemnité de la mort de son fils, il aurait servi trois ans entiers. » (Appolodore, Livre II, VI, 2).

Sur ordre de la Pythie, Heraclès est condamné à être réduit en esclavage durant trois ans auprès de la reine de Lydie, Omphale.

« Conformément à la réponse, Hermès mit Héraclès en vente, et Omphale l’acheta, la fille de Iardanos, la reine de Lydie, qui avait hérité le trône à la mort de son époux, Tmolos. Eurytos n’accepta pas le dédommagement qu’on lui porta. Toutefois, Héraclès resta l’esclave d’Omphale. » (Appolodore, Livre II, VI, 3).

Héraclès entretint une relation avec Omphale et eut un fils. L’Omphalos dans le cadre de Sardes n’est pas un objet en forme d’œuf recouverte d’un treillage, mais une reine.

« Voici tous les enfants qu’Héraclès (…) d’Omphale, il eut Agélaos, duquel descend la famille de Crésus. » (Appolodore, Livre II, VII, 8)

Crésus (561-547 av. J-C) sera un roi Lydien de la dynastie des héraclides, car il avait du sang d’Héraclès dans les veines.

« Crésus était Lydien de naissance, fils d’Alyattes, et tyran des nations que renferme l’Halys dans son cours. Ce fleuve coule du sud, passe entre le pays des Syriens (Cappadociens) et celui des Paphlagoniens, et se jette au nord dans le Pont-Euxin. (…) Voici comment la souveraine puissance, qui appartenait aux Héraclides, passa en la maison des Mermnades, dont était Crésus. Candaule, que les Grecs appellent Myrsile, fut tyran de Sardes. Il descendait d’Hercule par Alcée, fils de ce héros ; car Agron, fils de Ninus, petit-fils de Bélus, arrière-petit-fils d’Alcée, fut le premier des Héraclides qui régna à Sardes ; et Candaule, fils de Myrsus, fut le dernier. Les rois de ce pays antérieurs à Agron descendaient de Lydus, fils d’Atys, qui donna la nom de Lydiens à tous les peuples de cette contrée, qu’on appelait auparavant Méoniens. Enfin les Héraclides, à qui ces princes avaient confié l’administration du gouvernement, et qui tiraient leur origine d’Hercule et d’une esclave de Jardanus, obtinrent la royauté en vertu d’un oracle. Ils régnèrent de père en fils cinq cent cinq ans, en quinze générations, jusqu’à Candaule, fils de Myrsus. » (Hérodote, histoires, livre I, VI-VII).

IV : Mélitène.

Mélitène est un centre énergétique encore plus ancien que Sardes. Il se situe à l’extrémité Est de l’Asie Mineure (A). Il est le point de jonction entre la civilisation grecque et celle de Sumer (B).

A. La situation géographique de Mélitène.

Mélitène était un centre important à l’Ouest de l’Asie mineure (1) qui constitue le lien entre la Grèce et la Mésopotamie (2). C’est également là que pris naissance le culte d’Apollon et d’Artémis (3).

1. Un centre situé à l’Ouest de l’Asie Mineure.

Mélitène porta plusieurs noms à travers l’histoire. « Milid » en hittite ou « Meliddu » en assyrien. Cela signifie à chaque fois la même chose : « milieu« . Nous avions vu dans l’article précédent que le royaume central de l’Irlande s’appelait « Meath » et signifiait également « milieu. C’est une constante dans la géographie sacrée. Les « centres » portent souvent le nom de « milieu » dans la langue du pays concerné, comme par exemple le nom « médiolanum » chez les Celtes. Il existait plusieurs « médiolanum » en Europe, dont le plus célèbre fut « Milan ». Signalons aussi l’un des « médiolanum » français deviendra Saint-Benoît-sur-Loire, le centre géographique de la France et qui fut le lieu de la célèbre donation de Sainte-Jeanne d’Arc.

Mélitène porte actuellement le nom d’Arslantepe, ce qui veut dire « la colline du lion« . Le site archéologique est d’ailleurs célèbre pour ses statues zodiacales aux lions. Nous en reparlerons lorsque nous aborderons le site de Nemrod-Dag dans la partie suivante.

2. Lien avec la Mésopotamie.

Le lieu est peuplé depuis le sixième millénaire avant Jésus-Christ. Strabon évoque l’ancienneté de Mélitène et ses liens avec la Mésopotamie.

« Encore est-il constant que, parmi les [Cappadociens proprement dits ou] Cappadociens parlant la même langue, les Anciens distinguaient expressément les Cataoniens comme formant une nation à part, une nation différente de la nation cappadocienne, et que, quand ils énuméraient les peuples de cette partie de l’Asie, ils faisaient suivre les Cappadociens des Cataoniens, et les Cataoniens immédiatement des peuples d’au delà de l’Euphrate, considérant apparemment comme une dépendance de la Cataonie la Mélitène elle-même, laquelle se trouve située entre la Cataonie et l’Euphrate sur les confins de la Commagène et forme aujourd’hui juste un dixième de la Cappadoce par suite de la dernière division de cette contrée en dix stratégies ou préfectures. C’est ainsi, en effet, que de nos jours les rois de Cappadoce, prédécesseurs immédiats d’Archélaüs, ont jugé à propos de distribuer le territoire soumis à leur autorité. Du reste, la Cataonie, elle aussi, représente un dixième de la Cappadoce actuelle, et, comme la Mélitène, s’est toujours vu administrer de nos jours par un stratège ou préfet particulier. A vrai dire, quand on voit qu’aujourd’hui aucune différence sensible ni dans la langue ni dans les habitudes de la vie ne sépare les Cataoniens des autres populations de la Cappadoce, on peut s’étonner que les traces de leur origine étrangère se soient aussi complétement effacées, mais il n’en demeure pas moins certain qu’ainsi que nous le disions plus haut les Cataoniens avaient toujours formé une nation indépendante, quand Ariarathe, qui le premier se fit appeler roi de Cappadoce, les réunit de force à ses sujets. » (Strabon, Géographie, XII, I : 2)

Selon Strabon, le fleuve Euphrate qui part de Mélitène va jusqu’à Babylone.

« La chaîne du Taurus, en effet, qui prend naissance en Carie et en Lycie, ne présente encore dans cette première partie de son parcours ni beaucoup de largeur ni beaucoup de hauteur ; c’est seulement quand elle est parvenue en face des îles Chélidonées, auxquelles correspond le point initial de la côte de Pamphylie, qu’elle commence à s’élever sensiblement ; en même temps elle incline droit à l’E., forme les longues vallées de la Cilicie, puis se divise en deux branches, l’Amanus d’une part et l’Antitaurus de l’autre, l’Antitaurus, sur les flancs duquel est bâtie Comana, ville importante de la Haute-Cappadoce. Mais, tandis que cette dernière branche ne dépasse pas les limites de la Cataonie, l’Amanus s’avance jusqu’à l’Euphrate et à la Mélitène, canton appartenant à la Cappadoce et par lequel ce pays se trouve confiner à la Commagène. Les montagnes au delà de l’Euphrate continuent en réalité et prolongent l’Amanus, n’en étant séparées que par l’espace strictement nécessaire au passage du fleuve, mais elles se font remarquer par une augmentation sensible de hauteur et de largeur et par la multiplication des rameaux ou embranchements. De ces différents rameaux, c’est le plus méridional, celui qui sert de limite commune à l’Arménie et à la Mésopotamie, qui conserve le nom de Taurus.

Au sortir du même embranchement deux très grands fleuves commencent à envelopper la Mésopotamie pour se rapprocher ensuite dans les plaines de la Babylonie et aller se jeter finalement l’un et l’autre dans la mer Persique : ces deux fleuves sont l’Euphrate et le Tigre. L’Euphrate, qui est déjà le plus fort des deux, est aussi celui qui parcourt la plus grande étendue de pays, par suite des nombreuses sinuosités qu’il décrit. Né dans la partie septentrionale du Taurus, il se dirige vers l’O. à travers la Grande-Arménie et jusqu’aux confins de la Petite-Arménie, passe entre cette dernière province à droite et l’Akilisène à gauche, tourne ensuite brusquement au midi, atteint, dans ce détour, l’extrémité de la Cappadoce ; puis, laissant à droite la frontière de cette province et celle de la Commagène, à gauche celle de l’Akilisène et de la Sophène, double dépendance de la Grande-Arménie, s’avance jusqu’à la Syrie pour gagner de là, par un nouveau détour, la Babylonie et le golfe Persique. Quant au Tigre, qui prend sa source dans la partie méridionale du Taurus, il descend droit sur Séleucie et arrivé là se trouve avoir rejoint pour ainsi dire l’Euphrate en formant avec ce fleuve ce qu’on nomme la Mésopotamie ; après quoi il va se jeter, lui aussi, dans le golfe Persique. Ses sources, en revanche, sont séparées de celles de l’Euphrate par une distance de 2500 stades environ. (Strabon, Géographie, XI, XII : 2-3)

Ce que confirme cet autre passage :

« L’Euphrate, en effet, qui prend sa source sur le côté septentrional du Taurus et qui se dirige d’abord au couchant pour traverser toute l’Arménie, se détourne ensuite au midi et franchit le Taurus par une brèche profonde qui sépare précisément l’Arménie de la Cappadoce et de la Commagène ; puis, une fois parvenu dans la région trans-taurique, en Syrie, il commence à décrire dans la direction du levant d’hiver un nouveau coude qui l’amène jusqu’à Babylone et pendant lequel il forme avec le Tigre ce qu’on a appelé la Mésopotamie ; après quoi, les deux fleuves vont se jeter dans le golfe Persique. Comme on le voit, à l’exception de la frontière relativement peu étendue qui borde la Médie, le pourtour de l’Arménie presque tout entier consiste en terrains âpres et montagneux. Dans le Taurus (notamment dans le Taurus proprement dit, lequel recommence de l’autre côté de l’Euphrate en face de la Commagène et de la Mélitène). » (Strabon, Géographie, XI, XIV : 2)

Il existait donc des contacts très poussés entre Mélitène et Babylone. Contact économique mais aussi culturel. C’est ensuite depuis Mélitène que la culture sumérienne, dont l’astrologie, pénétra en Asie mineure, puis en Grèce.

3. Apollon et Artémis.

Le culte d’Apollon (a) comme celui d’Artémis (b) ont pris naissance à Mélitène. Les statuettes dites de la « belle Artémis » sont une forme d’omphalos (c).

a. Apollon.

Strabon explique que c’est depuis Mélitène que le culte d’Apollon, dont nous avons déjà vu la grande importance en matière de géographie sacrée se transmettra dans la région puis en Grèce.

« Pas plus que la Mélitène, la plane de la Cataonie ne possède de ville proprement dite ; mais il y a dans la partie montagneuse de ce pays des places très fortes, notamment la citadelle d’Azamora et celle de Dastarcum, au pied de laquelle passe le fleuve Carmalas. C’est là aussi que se trouve le temple d’Apollon Cataonien, temple vénéré dans toute la Cappadoce comme ayant servi de type aux autres édifices sacrés qu’on rencontre en ce pays. » (Strabon, Géographie, XII, II : 5)

b. Artémis.

Il en est de même de la sœur d’Apollon, Artémis (Diane chez les Romains), qui elle aussi joue un grand rôle en matière de géographie sacrée.

« C’est dans l’Antitaurus précisément, dans une des vallées étroites et profondes de cette chaîne, qu’est située Comana avec le fameux temple consacré à la déesse Mâ, la même que nous nommons Enyô. Comana est une ville considérable, mais qui doit surtout son importance à la multitude d’enthousiastes ou de prophètes et d’hiérodules ou d’esclaves sacrés qu’elle renferme. Ses habitants, bien que Cataoniens d’origine et bien que soumis nominalement au roi de Cappadoce, sont plutôt les sujets du grand prêtre [de Mâ]. Celui-ci a la surintendance du temple et règne en maître sur les hiérodules : or, à l’époque où nous avons visité ce temple, on y comptait plus de 6000 hiérodules, tant hommes que femmes. Un territoire spacieux dépend du temple et c’est encore le grand prêtre qui en perçoit les revenus. Le grand prêtre tient du reste en Cappadoce le second rang après le roi et en général jusqu’à présent rois et grands prêtres ont été choisis dans la même famille. La nature du culte rendu à la déesse Mâ a donné lieu de penser qu’Oreste, après s’être enfui avec sa soeur Iphigénie de la Scythie taurique, avait introduit dans cette contrée les rites du culte de Diane Tauropole ; la tradition ajoute que le frère et la soeur auraient en signe de deuil déposé leur chevelure sur l’autel de la déesse et que c’est de cette circonstance que la ville de Comana aurait tiré son nom. Cette ville est située sur les deux rives du fleuve Sarus qui, longtemps resserré dans les gorges ou étroites vallées du Taurus, se déploie enfin dans les plaines de la Cilicie pour aller se jeter au delà dans la mer de ce nom. » (Strabon, Géographie, XII, II : 3)

Plus loin, il évoque de nouveau la légende de Diane-Artémis. Tous en expliquant qu’elle ne vient pas de la région, mais d’outre-mer.

« Non loin de Tyane, mais encore plus près de la montagne, s’élèvent deux autres villes, Castabales et Cybistres, dont l’une (c’est Castabales que je veux dire) possède un temple dédié à Diane Pérasia et desservi par des prêtresses pouvant, dit-on, marcher impunément pieds nus sur des charbons ardents. Ici encore nous retrouvons la légende d’Oreste et de Diane Taurpole, quelques auteurs se fondant sur ce nom de Pérasia donné à la déesse pour prétendre que l’introduction de son culte en cette contrée a été une importation d’outre-mer. » (Strabon, Géographie, XII, II : 7)

c. La belle Artémis.

Il y a l’omphalos de Delphes, la Reine Omphale à Sardes et la « belle Artémis ». Les statues de la « belle Artémis » forment également une sorte d’omphalos (c-1). Fascinante question de la « belle Artémis » dont l’étude nécessiterait une série d’articles à elle seule. Il faut lire la description qu’en fait Jean Richer dans son livre « Géographie sacré dans le monde romain« . La « belle Artémis » est évoquée dans les Actes des Apôtres (c-2) lors d’un épisode célèbre avec Saint-Paul qui critique le culte des statues vivantes sur le modèle des « teraphim » (c-3). Notre-Dame de la treille à Lille reprend le modèle de la « belle Artémis » comme omphalos sous forme de statue pour l’appliquer au Catholicisme (c-4).

c-1. L’Artémis d’Ephèse.

Contrairement à l’omphalos de Delphes, il existait plusieurs « Belle Artémis » à travers le monde antique. Certaines sont parvenues jusqu’à nos jours. Elles représentaient l’Artémis d’Ephèse.

Ephèse était une cité qui se trouvait en Asie mineure dans une région proche de Sardes.

Chacune de ses statues était constituée sur le même modèle à plusieurs niveaux.

La belle Artémis d’Ephèse.
La grande Artémis.

Dans un premier niveau, des boucles d’oreilles avec des animaux zodiacaux.

Sur un deuxième niveau, un collier comportant de nombreuses perles et supportant des petits omphalos de forme sphérique. La surface du collier, avec ses petites bosses, fait penser à l’agrénon de Delphes.

En dessous du collier, au troisième niveau, un grand nombre de « seins » qui font penser à des omphalos, mais sans agrénon ou alors aux bosses présente sur la surface de la pomme de pin. Comme pour le niveau précédent, sans doute la représentation du réseau Curry.

Enfin, au quatrième niveau, un quadrillage en forme de carré droit par ranger de trois animaux zodiacaux. Dans ce cas-là, le quadrillage est droit et représenterait plutôt le réseau Hartman.

c-2. La « belle Artémis » dans les Actes des Apôtres.

La belle Artémis est évoquée dans les Actes des Apôtres.

« Il survint en ce temps-là un grand tumulte au sujet de la voie du Seigneur. Un orfèvre, nommé Démétrius, fabriquait en argent de petits temples de Diane, et procurait à ses ouvriers un gain considérable. Les ayant rassemblés, avec ceux du même métier, il leur dit : « Mes amis, vous savez que notre bien-être dépend de cette industrie ; et vous voyez et entendez dire que, non seulement à Ephèse, mais encore dans presque toute l’Asie, ce Paul a persuadé et détourné une foule de gens, en disant que les dieux faits de main d’homme ne sont pas des dieux. Il est donc à craindre, non seulement que notre industrie ne tombe dans le discrédit, mais encore que le temple de la grande déesse Diane ne soit tenu pour rien, et même que la majesté de celle que révèrent l’Asie et le monde entier ne soit réduite à néant. » A ces mots, transportés de colère, ils se mirent à crier : « Grande est la Diane des Ephésiens ! » » (Actes, XIX : 23, 28).

Un orfèvre d’Ephèse fabriquait des temples de Diane et donc d’Artémis en miniature et les revendait.

Il s’agit d’une réplique du temple d’Artémis, surnommé l’Artémision, qui fut une des sept merveilles du monde.

Reconstitution du temple au parc Miniatürk d’Istanbul.

Saint-Paul déclare que « les dieux faits de main d’homme ne sont pas des dieux« . Il évoque ainsi, les « statues vivantes » dont l’Antiquité regorge. On pensait alors qu’un dieu vivait à l’intérieur de celle-ci.

c-3. Les « teraphim« .

Les statues vivantes font également référence à l’histoire religieuse de Sumer. Les Mésopotamiens considéraient que les dieux demeuraient à l’intérieur des statues. Statues qui étaient installées à l’intérieur d’un Temple, d’une ziggourat.

« Si, du moins, ils n’ont jamais été imaginés demeurer dans le coeur de l’homme, on a vu qu’ils résidaient véritablement dans Leurs Statues, et par suite dans les sanctuaires où elles étaient disposées. » (Jean Bottéro, la plus vieille religion, folio, p. 141-145).

Les dieux, par l’intermédiaire de ses statues vivaient parmi les hommes comme les hommes.

« Il devait, en bonne logique, être calqué aussi sur celui des hommes. La lecture des mythes est largement édifiante sur ce chapitre ; et même le culte, on le verra, était fondé sur les besoins des dieux pareils aux nôtres : le manger et le boire, le vêtement et la parure, le désir d’une vie opulente et insoucieuse en de larges et luxueuses « maisons », parmi les festivités. » (Jean Bottéro, la plus vieille religion, folio, p. 141-142).

Ils mangeaient, buvaient et s’habillaient comme les hommes. Nous avons retrouvé des tablettes comptables indiquant les quantités astronomiques de nourriture qui étaient mis à la disposition du dieu. De la nourriture bien réelle.

« Nous avons surtout un véritable torrent d’informations relatives à l’approvisionnement des sanctuaires : enregistrement de quantités, parfois impressionnantes, de victuailles de toute sorte, acheminées vers les temples et entrées dans leurs réserves. Le témoignage le plus saisissant est peut-être celui que nous a rendu, par milliers de tablettes. » (Jean Bottéro, la plus vieille religion, folio, p. 251).

Le temple disposait également de moyen de transport pour permettre le déplacement du dieu hors du temple. Déplacement en chariot ou en bateau.

« Comme les rois en leur palais, Ils avaient chacun, dans Son temple et à Sa disposition, des palanquins (tallu), des chars (narkabtu), des bateaux de transport (eleppu, etc), dans lesquels, suivant les nécessités de la liturgie, qui exigeait parfois leur présence hors du temple, voire hors de son territoire, on pouvait, sous les espèces de Leurs images, les emmener processionner ou voyager ailleurs – toujours à l’image des souverains. » (Jean Bottéro, la plus vieille religion, folio, p. 264).

Cette tradition du dieu vivant dans une statue va être repris au début du judaïsme avec les « teraphim« .

« Il y avait un homme de la montagne d’Ephraïm, nommé Michas. Il dit à sa mère :  » Les mille et cent sicles d’argent qu’on t’a pris, et au sujet desquels tu as prononcé une malédiction, — et tu l’as même prononcée à mes oreilles, — voici, cet argent est entre mes mains, c’est moi qui l’ai pris.  » Et sa mère dit :  » Que mon fils soit béni de Yahvé !  » Il rendit à sa mère les mille et cent sicles d’argent ; et sa mère dit :  » Je consacre de ma main cet argent à Yahvé pour mon fils, afin d’en faire une image taillée et un objet en fonte ; et maintenant je te le rends.  » Lorsqu’il eut rendu l’argent à sa mère, sa mère prit deux cents sicles et les donna au fondeur, qui en fit une image taillée et un objet en fonte ; et ils furent dans la maison de Michas. Car ce Michas avait une maison de Dieu ; il fit un éphod et des théraphim, et il consacra un de ses fils, qui lui servit de prêtre.

En ce temps-là, il n’y avait pas de roi en Israël ; chacun faisait ce qui était bon à ses yeux. » (Jude, XVII : 1-6)

Le teraphim était une statue représentant un ancien dieu auquel les Juifs de ce temps croyaient. On peut imaginer qu’il s’agir de l’un des dieux sumériens qui ont été transmis par Abraham aux Hébreux. Ensuite, Yahvé, dans les dix commandements interdira ce genre de pratique afin de provoquer la rupture avec d’anciennes traditions.

« Tu ne te feras pas d’image taillée, ni aucune figure de ce qui est en haut dans le ciel, ou de ce qui est en bas sur la terre, ou de ce qui est dans les eaux au-dessous de la terre. Tu ne te prosterneras point devant elles et tu ne les serviras point. Car moi Yahvé, ton Dieu, je suis un Dieu jaloux, qui punis l’iniquité des pères sur les enfants, sur la troisième et sur la quatrième génération pour ceux qui me haïssent, et faisant miséricorde jusqu’à mille générations, pour ceux m’aiment et qui gardent mes commandements. » (Exode, XX : 4-6).

C’est la fin de pratique des teraphim. C’est pour cela que Saint-Paul va condamner les sculptures d’Artémis. Ce qui est interdit, c’est de croire qu’un dieu se trouve vivant à l’intérieur d’une. C’est de l’idolâtrer, sur le modèle de ce qui se faisait à Sumer. Ce n’est pas le cas des statues omphalos, qui vont ensuite être reprisent en les modifiants par le Christianisme.

c-4. Notre Dame de la Treille.

D’ailleurs, on retrouve parfois des statues omphalos sur le modèle de la belle Artémis, mais le rôle d’Artémis est remplacé par la Sainte-Vierge. Nous avons déjà vu la Vierge à la pomme de pin, mais il existe également Notre Dame de la Treille à Lille, une ville cher à mon cœur.

Voici ce qu’en dit l’abbé Hamon, curé de Saint-Sulpice dans son extraordinaire étude sur « Notre Dame de France » :

« Notre-Dame de la Treille fut le plus célèbre sanctuaire de la sainte Vierge à Lille ; il était situé autrefois dans l’église Saint-Pierre. La statue qu’on honore sous ce titre est environnée d’une treille de fer où les pèlerins attachaient leurs dons ; elle est de pierre blanche, artistement taillée, dit le P. Vincart, qui en a écrit l’histoire ; sa pose est celle d’une reine assise sur son trône ; elle tient au bras gauche l’Enfant Jésus et dans la main droite un sceptre.

Le culte rendu à cette image est aussi ancien que la ville de Lille ; il est comme enraciné dans les bases de la cité, qui s’appelle avec orgueil la cité de Marie, Insula civitas virginis. » (Abbé Hamon, Notre Dame de la Treille, p. 5-6).

Notre Dame de la Treille.

Notre-Dame de la Treille de Lille est un autre omphalos, comme la belle Artémis. Elle est le pendent chrétien d’Artémis. On a christianisé la déesse asiatique.

La treille qui se trouve au pied de la statue, comme les multiples seins et le quadrillage animalier de la « belle Artémis » représente de manière évidente l’agrénon de Delphes. C’est une représentation stylisée des forces magnétiques qui parcourt la terre.

Près de Mélitène, se trouve Nemrod-Dag, le mont Nemrod (1). Le mont Nemrod porte ce nom en hommage au personnage biblique de Nemrod (2).

B. Nemrod et la fondation de Babylone et de Ninive.

Nemrod est associé au nom d’un monticule près de Mélitène, le Nemrod-Dag (1), il est associé dans la Bible à la géographie sacrée en fondant un certains nombres de ville importante (2).

1. Nemrod-Dag.

Le tumulus, au sommet de la montagne de nemrod dag.

Le site de Nemrod-Dag est connu pour ses statues géantes sur le modèle des statues de l’île de Pâques.

Des statues dont les têtes se sont détachées du reste du corps.

Statues de l’île de Pâques.

Nous retrouvons également toute une symbolique astrologique dans les statues dont je ne parlerais pas dans cet article. Je l’évoquerais plus loin dans un autre article. Toute une symbolique que l’on retrouvera en Grèce et qui montre que c’est probablement depuis Mélitène que se savoir fut transmis au monde grec. Sur ce point, je ne fait que reprendre la pensée de Jean Richer qui avait pressenti le rôle de Mélitène sans avoir eu le temps de le prouver. J’ai continué ses travaux et j’en apporterais la preuve ultérieurement.

2. Nemrod et la géographie sacrée.

Le nom de Nemrod fait penser à un personnage biblique qui vécu en Mésopotamie. Il fait, lui aussi, la jonction entre Sumer et la géographie sacrée avec la cité de Mélitène.

Après le déluge, la terre se repeuple progressivement avec les enfants des trois fils de Noé : Sem, Cham et Japhet.

Cham eut quatre fils : Chus, Mesraïm, Phuth et Chanaan.

Intéressons-nous à Chus.

« Chus engendra Nemrod : celui-ci fut le premier un homme puissant sur la terre. Ce fut un vaillant chasseur devant Yahvé ; c’est pourquoi l’on dit :  » Comme Nemrod, vaillant chasseur devant Yahvé.  » Le commencement de son empire fut Babel, Arach, Achad et Chalanné au pays de Sennaar. De ce pays il alla en Assur, et bâtit Ninive, Rechoboth-Ir, Chalé, et Résen, entre Ninive et Chalé ; c’est la grande ville. » (Genèse, X : 8-12).

Chus eu un fils, Nemrod qui fonda Babylone (a), puis Ninive (b).

a. Babylone.

Nemrod s’installa dans le pays de Sennaar pour devenir roi d’un puissant Royaume. C’est le premier royaume de Daniel. Cet empire, c’est Babel dont la capitale fut Babylone. Babylone se trouvait dans un lieu proche de l’actuels Bagdad.

C’est sous la direction de Nemrod que furent bâties Babylone et la célèbre tour de Babel.

« Toute la terre avait une seule langue et les mêmes mots. Etant partis de l’Orient, les hommes trouvèrent une plaine dans le pays de Sennaar, et ils s’y établirent. Ils se dirent entre eux :  » Allons, faisons des briques, et cuisons-les au feu.  » Et ils se servirent de briques au lieu de pierres, et de bitume au lieu de ciment. Ils dirent encore :  » Allons, bâtissons-nous une ville et une tour dont le sommet soit dans le ciel, et faisons-nous un monument, de peur que nous ne soyons dispersés sur la face de toute la terre.  » Mais Yahvé descendit pour voir la ville et la tour que bâtissaient les fils des hommes. Et Yahvé dit :  » Voici, ils sont un seul peuple et ils ont pour eux tous une même langue ; et cet ouvrage est le commencement de leurs entreprises ; maintenant rien ne les empêchera d’accomplir leurs projets. Allons, descendons, et là même confondons leur langage, de sorte qu’ils n’entendent plus le langage les uns des autres.  » C’est ainsi que Yahvé les dispersa de là sur la face de toute la terre, et ils cessèrent de bâtir la ville. C’est pourquoi on lui donna le nom de Babel, car c’est là que Yahvé confondit le langage de toute la terre, et c’est de là que Yahvé les a dispersés sur la face de toute la terre. » (Genèse, XI : 1-9).

C’est à partir de Babylone que Dieu dispersa les hommes sur le reste du monde. C’est donc depuis la Mésopotamie que le savoir va se répandre en Asie Mineure puis en Grèce ou vers Jérusalem. Nous avons vu la première ligne de diffusion vers la Grèce, nous allons voir, la deuxième ligne de diffusion, vers la terre sainte au chapitre suivant avec l’étude d’Hébron.

La Confusion des langues, Gustave Doré.
b. Ninive.

Nemrod devient roi d’Assur sans doute par la conquête militaire, où il va fonder la cité de Ninive.

Ninive se trouvait dans la périphérie de l’actuelle cité de Mossoul. Elle fut la capitale de l’empire d’Assyrie.

Comme Babylone, Ninive est cité plusieurs fois dans la Bible, en étant associée au mal et à la corruption.

« Malheur à la ville sanguinaire, pleine de mensonge, pleine de violence, et qui ne cesse de se livrer à la rapine !…

On entend le bruit du fouet, le bruit des roues, le galop des chevaux, le roulement des chars.

Les cavaliers s’élancent, l’épée étincelle, la lance brille… Une multitude de blessés !… une foule de cadavres !… Des morts à l’infini !… On tombe sur les morts !…

C’est à cause des nombreuses prostitutions de la prostituée, pleine d’attraits, habile enchanteresse, qui vendait les nations par ses prostitutions et les peuples par ses enchantements.

Voici, j’en veux à toi, dit l’Éternel des armées, je relèverai tes pans jusque sur ton visage, je montrerai ta nudité aux nations, et ta honte aux royaumes.

Je jetterai sur toi des impuretés, je t’avilirai, et je te donnerai en spectacle.

Tous ceux qui te verront fuiront loin de toi, et l’on dira : Ninive est détruite ! Qui la plaindra ? Où te chercherai-je des consolateurs ? » (Nahum, III : 1-7)

Nemrod, comme plus tard Hiram seront repris dans la légende maçonnique sur le savoir des constructeurs. Une connaissance cachée qui permettrait de construire des monuments selon les principes de la géographie sacrée que la franc-maçonnerie prétendra perpétuer.

V : Hébron.

Nous retrouvons un équivalent de Delphes, de Délos, de Sardes ou de Mélitène dans le judaïsme. C’est la ville d’Hébron. Nous savons que l’astrologie et la géographie sacrée ont été transmis à la Grèce via la cité de Mélitène. De même, ces savoirs ancestraux ont été transmis à la terre sainte par Abraham. Abraham, quitta Ur (A), pour rejoindre d’abord Harran (B) puis de la Terre sainte (C) pour fonder une nouvelle religion.

A. Le départ d’Ur.

Abraham et sa famille sont effectivement originaires de Sumer et plus particulièrement d’Ur.

« Et Aran mourut en présence de Tharé, son père, au pays de sa naissance, à Ur en Chaldée. Abram et Nachor prirent des femmes : le nom de la femme d’Abram était Saraï, et le nom de la femme de Nachor était Melcha, fille d’Aran, père de Melcha et père de Jesca. Or Saraï fut stérile : elle n’avait point d’enfants. Tharé prit Abram, son fils, et Lot, fils d’Aran, son petit-fils, et Saraï, sa belle-fille, femme d’Abram, son fils, et ils sortirent ensemble d’Ur des Chaldéens, pour aller au pays de Chanaan ; mais, arrivés à Haran, ils s’y établirent. » (Genèse, XI : 28-31).

Yahvé demande à Abraham de quitter la Chaldée (la Mésopotamie) pour aller en terre sainte.

« Et il lui dit : « Je suis Yahvé, qui t’ai fait sortir d’Ur des Chaldéens, afin de te donner ce pays pour le posséder.«  » (Genèse, XV : 7)

Abraham doit posséder la terre de Canaan pour fonder une nouvelle religion.

La Bible ne donne aucun indice sur la raison du départ d’Abraham. Sous le dernier roi de la troisième dynastie d’Ur, Ibbi-Sin, Sumer fut en guerre contre Elam et Suse. Le roi sumérien sera vaincu, son territoire occupé militairement. Il sera emmené en captivité à Suse.

On imagine bien Abraham quittant Ur avec sa famille, quelque temps avant la catastrophe, des tablettes sumériennes sous les bras et dans ses bagages afin de sauver le savoir ancestral de son peuple et de le transmettre aux Hébreux, là-bas en terre sainte. Une migration forcée par le destin pour éviter que tous ne soient perdus à jamais.

Revenons au texte sumérien « Enki, ordonnateur du monde ». Il parle d’Ur dont nous savons le rôle particulier qu’elle joua dans la naissance du judaïsme, puis du christianisme.

« Puis, arrivé à Ur, la cité sainte,

Enki, roi de l’Apsû, en arrêta le destin :

« Cité toute-parfaite, les pieds dans l’eau,

Taureau puissant,

Riche estrade qui domine la terre,

Haute comme une montagne,

Bosquet embaumé, à l’ombre déployée,

Sûre de ta force,

Les Pouvoirs préparés pour toi te combleront !

Car Enlil, le Grand-Mont,

A prononcé devant l’univers ton nom sublime !

Ô cité dont Enki aura arrêté le destin,

Ô ville sainte d’Ur, tu seras exhaussée jusqu’au ciel ! « 

(Jean Bottéro, lorsque les dieux faisaient les hommes, p. 172).

Ur est présenté comme une ville sainte qui est rehaussée jusqu’au ciel. Il est question d’un bosquet embaumé et d’une haute montagne, qui font penser à l’épisode de Moïse avec le buisson ardent du décalogue.

« Moïse faisait paître le troupeau de Jéthro, son beau-père, prêtre de Madian. Il mena le troupeau au delà du désert, et arriva à la montagne de Dieu, à Horeb. L’ange de Yahvé lui apparut en flamme de feu, du milieu du buisson. Et Moïse vit, et voici, le buisson était tout en feu, et le buisson ne se consumait pas.

Moïse dit :  » Je veux faire un détour pour considérer cette grande vision, et voir pourquoi le buisson ne se consume point.  » Yahvé vit qu’il se détournait pour regarder ; et Dieu l’appela du milieu du buisson, et dit :  » Moïse ! Moïse !  » Il répondit :  » Me voici.  » Dieu dit :  » N’approche pas d’ici, ôte tes sandales de tes pieds, car le lieu sur lequel tu te tiens est une terre sainte.  » Il ajouta :  » Je suis le Dieu de ton père, le Dieu d’Abraham, le Dieu d’Isaac et le Dieu de Jacob.  » Moïse se cacha le visage, car il craignait de regarder Dieu. » (Exode, III : 1-6)

Depuis le buisson où il parle, Yahvé se présente comme le Dieu d’Abraham.

Déjà, dans les textes sumériens, il y avait l’annonce d’Abraham et de Moïse. C’est donc qu’il annonçait également l’avènement du judaïsme et du christianisme comme étant la continuatrice de la religion de Sumer.

B. Abraham à Harran.

Ur était une ville sumérienne dédiée à la déesse lunaire Nanna (en Sumérien) ou Sîn (en Akkadien).

Le ziggurat d’Ur était dédié à la déesse Nanna. Il existe encore de nos jours, partiellement conservé.

Ruines d’Ur, avec la ziggurat en arrière-plan.
La ziggourat d’Ur restituée en images de synthèse.

Abraham et sa famille traversent la Mésopotamie, pour se rendre dans une autre ville sumérienne, elle aussi dédiée à Nanna. Il s’agit d’Harran. Cela a été trop peut noter par les théologiens et les historiens.

C’est un fait fondamental.

Fondamentale, car il ne quitte pas immédiatement la civilisation sumérienne. Il entend continuer cette civilisation avant de faire son entrée en terre sainte.

Abraham, alors appelé Abram restera là-bas jusqu’à l’âge de 75 ans. Il n’est pas seul, mais accompagné de sa femme Sarah, alors prénommée, Saraï, de son père Tharé et de son neveu Lot.

Le texte biblique ne dit pas grand-chose de son séjour à Harran.

« Tharé prit Abram, son fils, et Lot , fils d’Aran, son petit-fils, et Saraï, sa belle-fille, femme d’Abram, son fils, et ils sortirent ensemble d’Ur des Chaldéens, pour aller au pays de Chanaan ; mais, arrivés à Haran, ils s’y établirent. » (Genèse, XI : 31)

Son père, Tharé mourra à Harran comme le relate la Bible.

« Les jours de Tharé furent de deux cent cinq ans, et Tharé mourut à Haran. » (Genèse, XI : 32)

Nous retrouvons trace de ses deux cultures, sumérienne et juive à travers les deux femmes de Jacob, le petit-fils d’Abraham.

Jacob va se marier avec deux sœurs.

L’aîné, Léa, lui donnera six enfants : Ruben, Siméon, Lévi, Juda, Issachar et Zabulon. Son nom signifie « le lion » en hébreu, comme « leo » en latin, alors qu’en Akkadien, Léa signifie « la vache« .

La cadette, Rachel, dont le nom signifie « la brebis » en hébreu donnera deux enfants : Joseph et Benjamin.

Le nom des deux sœurs marque comme un passage de témoins de l’ère du Taureau (l’aîné, Léa, « la vache ») à l’ère du Bélier (la cadette, Rachel, « la brebis »). Elles marquent également le passage de témoin de Sumer (l’ainé, Léa, nom d’origine akkadienne) à Israël (Rachel, nom d’origine hébreu).

C. Abraham en terre sainte.

Abraham, Sarah et lot quitteront Harran pour se rendre en terre sainte.

« Yahvé dit à Abram : « Va-t-en de ton pays, de ta famille et de la maison de ton père, dans le pays que je te montrerai. Je ferai de toi une grande nation, je te bénirai et je rendrai grand ton nom. Tu seras une bénédiction : Je bénirai ceux qui te béniront, et celui qui te maudira, je le maudirai, et toutes les familles de la terre seront bénies en toi. »

Abram partit, comme Yahvé le lui avait dit, et Lot s’en alla avec lui. Abram avait soixante-quinze ans quand il sortit de Haran. Abram prit Saraï, sa femme, et Lot, fils de son frère, ainsi que tous les biens qu’ils possédaient et les serviteurs qu’ils avaient acquis à Haran, et ils partirent pour aller au pays de Chanaan. Et ils arrivèrent au pays de Chanaan. Abram traversa le pays jusqu’au lieu nommé Sichem, jusqu’au chêne de Moré. — Les Chananéens étaient alors dans le pays. — Yahvé apparut à Abram et lui dit : « je donnerai ce pays à ta postérité. » Et Abram bâtit là un autel à Yahvé qui lui était apparu. Il passa de là à la montagne, à l’orient de Béthel, et il dressa sa tente, ayant Béthel au couchant et Haï à l’orient. Là encore il bâtit un autel à Yahvé, et il invoqua le nom de Yahvé. » (Genèse, XII : 1-8).

Le Nouveau Testament fait également référence au voyage d’Abraham d’Harran vers la terre sainte. Cela montre que les Chrétiens eux aussi reconnaissent l’origine mésopotamienne de leur religion.

« Le grand prêtre lui demanda :  » En est-il bien ainsi ?  » Etienne répondit :  » Mes frères et mes pères, écoutez. Le Dieu de gloire apparut à notre père Abraham, lorsqu’il était en Mésopotamie, avant qu’il vint demeurer à Haran, et lui dit :  » Quitte ton pays et ta famille, et va dans le pays que je te montrerai.  » Alors il quitta le pays des Chaldéens et s’établit à Haran. De là, après la mort de son père, Dieu le fit émigrer dans ce pays que vous habitez maintenant. » (Apôtre, VII : 1-4).

Abraham marcha d’abord jusqu’à Sichem.

Sichem est un des lieux les plus important de la géographie sacré dans le judaïsme et dans le christianisme. Le lieu deviendra la capitale du royaume d’Israël, après la séparation d’avec le Royaume de Juda. Mais attention, ce n’est pas le centre sacré.

Le mur de la ville et la porte de Tell Balata.

1. Le chêne de Moré.

Après être passé par Sichem, Abraham se rendit au pied d’un chêne dit de Moré à côté de la cité d’Hébron.

C’est ici que se situe le vrai centre du judaïsme au sens de la géographie sacrée. Pour preuve, c’est ici que Yahvé apparaît à Abraham et c’est là que ce dernier va édifier un autel en hommage à Dieu comme le relate le passage XII : 6 et 7 de la Genèse.

Comme pour Sichem, le lieu est parfaitement connu de nos jours.

Il fait l’objet d’une intense vénération de la part des Juifs et des Chrétiens. Le lieu est actuellement la propriété des Russes orthodoxes.

Photographie du chêne de Moré vers 1900.

Il est mort depuis 1996 et ne tient debout qu’en raison d’une armature métallique.

Le chêne de Moré en 2008.
News Tribune, Rome, 29 décembre 1996.

C’est auprès du chêne de Moré ou de Membré qu’Abraham vint s’installer pour y vivre.

« Abram leva ses tentes et vint habiter aux chênes de Mambré, qui sont en Hébron ; et il bâtit là un autel à Yahvé. » (Genèse, XIII : 18).

2. Le tombeau des Patriarches.

Abraham au terme de sa vie choisira d’être enterré près du chêne de Moré.

« Puis il leur donna cet ordre :  » Je vais être réuni à mon peuple ; enterrez-moi avec mes pères dans la caverne qui est dans le champ d’Ephron, le Héthéen, dans la caverne du champ de Macpéla, en face de Mambré, au pays de Chanaan : c’est la caverne qu’Abraham a acquise d’Ephron, le Héthéen, avec le champ, pour avoir un sépulcre qui lui appartienne. C’est là qu’on a enterré Abraham et Sara, sa femme, c’est là qu’on a enterré Isaac et Rebecca, sa femme, et c’est là que j’ai enterré Lia.  » Le champ et la caverne qui s’y trouve ont été acquis des fils de Heth. Lorsque Jacob eut achevé de donner ses ordres à ses fils, ayant retiré ses pieds dans le lit, il expira et fut réuni à ses pères. » (Genèse, XLIX : 29-33).

Tombeau des patriarches, Hébron.

Quatre couples sont enterrés dans le tombeau des patriarches :

Rappelons que le tombeau des patriarches est un lieu sacré pour les trois grandes religions : judaïsme, Christianisme et Islam.

3. Le sacre des rois d’Israël à Hébron.

C’est à Hébron que les rois d’Israël seront sacré et installeront leur capitale, à partir de David.

« Après cela, David consulta Yahvé, en disant : « Monterai-je dans une des villes de Juda ? » Yahvé lui répondit : « Monte. » David dit : « Où monterai-je ? » Et Yahvé répondit : « A Hébron. » David y monta, avec ses deux femmes, Achinoam de Jezraël et Abigaïl de Carmel, femme de Nabal. David fit aussi monter les hommes qui étaient avec lui, chacun avec sa famille ; ils habitèrent dans les villes d’Hébron. Et les hommes de Juda vinrent, et là ils oignirent David pour roi sur la maison de Juda. » (2 Samuel, II : 1-4)

Ensuite, la capitale du royaume sera transférée à Jérusalem.

Il existe un autre centre spirituel en terre sainte, lié au christianisme, c’est à Jérusalem.

A l’intérieur de la basilique du Saint-Sépulcre, là où est mort, puis est revenu à la vie le Christ, se trouve un « omphalos » dans un bénitier en forme de rose. Cet « omphalos » ne comporte qu’une croix avec un point central. Ce sont les axes du monde dont le centre est le pivot. C’est ce que nous verrons dans l’article suivant.

Le Saint-Sépulcre est considéré par les Chrétiens comme le centre du monde, sur le modèle que l’omphalos de Delphes. Ce qui montre l’influence grecque sur le christianisme.

Omphalos du Saint-Sépulcre.
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