L’astrologie sumérienne (5)
Il existe un lien évident entre l’astrologie et le calendrier, comme l’avait remarqué si justement le regretté Jean Richer. Il rêvait d’écrire un livre sur le sujet. Il espérait également que d’autres chercheurs prendraient sa relève pour continuer ses recherches. J’ai lu avec passion ses livres et je pense à lui en ce moment lorsque j’aborde ce sujet. Dans « la géographie sacrée du monde Grec« , il étudia l’astrologie grecque, dans « la géographie sacrée dans le monde romain« , il aborda l’astrologie romaine, dans « Delphes, Delos et Cumes« , il tenta une esquisse de synthèse des deux précédent livre, en ouvrant des perspectives vers l’Asie mineur et en particulier avec la Perse et la Mésopotamie; sans avoir étudié l’astrologie sumérienne. Il sous-entendait que l’origine de la géographie sacrée se trouvait à Sumer. Il avait entièrement raison. J’ai longuement étudié cette question pour le confirmer. Je n’aborderais pas cette question dans cet article qui ne concernera que le lien entre le calendrier et l’astrologie. Je me réserve la question pour une autre série d’articles. Le sujet est trop vaste.
Ses livres peuvent facilement être trouvés d’occasion sur Internet, à des sommes abordables. Ceux sur le monde grec et romain sont d’un accès assez difficile pour un non-initié en astrologie, alors que celui sur Delphes, Delos et Cumes est « grand public ».
Dans cet article, je traiterais du calendrier annuel (I), mais également les ères civilisationnelles (II).
I : Le calendrier annuel.
Le calendrier mésopotamien était un calendrier dit soli-lunaire comme le montre « le dictionnaire de la civilisation mésopotamienne ».
« Le calendrier des anciens Mésopotamiens rythme les activités agricoles et religieuses. Il est fondé, comme dans toutes les autres civilisations, sur des intervalles de temps naturels donnés par la marche du soleil, le cycle des saisons et le mouvement de la Lune. Il en résulte un calendrier luni-solaire composé d’une année solaire, de mois lunaire et d’un jour solaire. » (Dictionnaire de la civilisation mésopotamienne, Bouquins, p. 151)
Le calendrier est basé sur le parcours dans le ciel du Soleil et de la Lune, d’où l’expression soli-lunaire.
A : L’année (Mu en sumérien, Sattu en akkadien).
« L’année solaire (mu en sumérien, sattu en akkadien) est définie par le retour successif des saisons. Le nouvel an est généralement fêté le jour de l’équinoxe de printemps. Toutefois, à Ebba au IIIe millénaire ou encore à Assur, dans la première moitié du IIe millénaire, les Assyriens adoptent le calendrier babylonien et commencent la nouvelle année en mars-avril, au printemps. » (Dictionnaire de la civilisation mésopotamienne, Bouquins, p. 151)
Le rythme de l’année est fixé par le Soleil. Il est divisé en quatre-saisons selon les solstices et équinoxes.
Le début de l’année est fixé traditionnellement à l’équinoxe de printemps. Parfois, selon les époques et les cités, cela pouvait être celui d’automne.
Cela permet de fixer quatre secteurs dans le ciel, en fonction des quatre saisons. L’entrée du Soleil dans le signe cardinale permet de fixer la date de l’équinoxe ou du solstice. Nous avons le Bélier, pour le Printemps, le Cancer, pour l’été, la Balance pour l’automne et le Capricorne pour l’hiver. Chaque saison comporte trois mois, donc trois signes zodiacaux.
Au niveau de l’astrologie mondiale, c’est le thème de l’année qui doit être dressé le jour de l’entrée du Soleil en Bélier. On parle d’Ingres de Bélier, valable pour l’ensemble de l’année. Ensuite, pour chaque saison, un thème sera dressé pour chaque entrée du Soleil, en Cancer pour l’été, en Balance pour l’automne et en Capricorne pour l’hiver. Les Ingres de Cancer, de Balance et de Capricorne étant valable pour leurs saisons respectives.
B : Le mois (iti en sumérien, warhu, en akkadien)
« Le mois (Iti en sumérien), dont le nom akkadien, warhu, est formé à partir d’une désignation du dieu Lune, est défini comme l’intervalle de temps écoulé entre deux apparitions successives de la première lune. Le mois commence le soir où le nouveau croissant lunaire réapparaît pour la première fois sur l’horizon ouest juste après le coucher du Soleil. » (Dictionnaire de la civilisation mésopotamienne, Bouquins, p. 152)
Le parcours de la Lune permet de calculer les mois. Il y a douze mois dans une année en Mésopotamie. C’est pour cela que la tablette « mul.apin » parle du parcours de la Lune dans les douze signes du zodiaque.
Les mois de l’année ne portent pas le même nom que les signes du zodiaque. Il ne commence pas à la même date. On ne peut pas superposer les deux éléments. C’est encore le cas encore aujourd’hui.
Au niveau de l’astrologie mondiale, pour chaque mois, on dressera un thème dit de lunaison correspondant à la conjonction Soleil-Lune. Une lunaison pouvait également être une éclipse, si elle se trouve à proximité d’un des deux nœuds lunaires (tête et queue du dragon).
II : Les ères civilisationnelles.
A Sumer, le calendrier ne concerne pas seulement des périodes courtes comme l’année, les saisons et les mois, mais des durées plus longue qui s’applique aux dynasties ou aux civilisations. C’est un aspect souvent négligé et pourtant très important. A ma connaissance, mais je suis loin d’avoir tout lu sur le sujet, ce thème n’a jamais été abordé d’une manière aussi détaillée. Toutefois, j’ai l’honnêteté de reconnaître que l’idée m’est venu en lisant « la plus vieille religion » de Jean Botéro. Grâce à lui, j’ai pu remonter le fil de l’histoire et élaborer la théorie que je vais vous présenter. Je vous propose de suivre le cheminement de ma pensée avec moi afin de bien comprendre de quoi je parle.
Je cite dans son intégralité le passage afin d’éclairer mes lecteurs.
« Quant à la fin du monde, les documents en notre possession ne nous permettent pas de savoir si les vieux Sages de Mésopotamie y avaient réfléchi. Bérose (p. 398) le laisserait entendre, en leur attribuant une doctrine selon laquelle la durée totale du Monde devait comprendre « douze fois douze sares d’années », soit cent quarante-quatre « sares », qui font cinq cent dix-huit mille quatre cent ans, desquels s’étaient déjà écoulés, de son temps, quatre cent trente-deux mille ans des règnes antédiluviens de la Liste royale sumérienne, plus trente-quatre mille quatre-vingts , ou selon une autre chronologie, trente-trois mille quatre-vingt-onze ans, de la fin du Déluge à la Première Dynastie babylonienne ; plus mille cinq cent soixante-quatre ans de cette Dynastie à Alexandre le Grand, contemporain dudit Bérose.
Il ne nous resterait donc plus que douze « sares » d’années, soit quarante-trois mille deux cents ans d’existence…
Il est probable, car Bérose est un témoin, non seulement bien au courant des traditions de son pays, mais en général très fidèle, que c’est là l’écho de spéculations authentiques – dont le vertigineux n’a rien de surprenant pour qui connaît les chiffres fantastiques que la même Liste royales sumérienne attribue aux vieux rois, surtout antérieurs au Déluge. Mais, faute de documents du cru, nous ne pouvons être sûrs de rien, ni préciser davantage. Et, de toute manière, il y a les plus fortes chances que si de telles spéculations se sont faites, elles n’avaient rien d’officiel, et encore moins de fondamental dans le système religieux. Enfin, dans ce qu’il nous reste de son livre, Bérose ne souffle mot du vrai problème : les Sages dont il rapporte les élucubrations pensaient-ils à la fin d’un monde – remplacé alors par quoi ? – ou à la fin, absolue, du Monde, à disparaître à jamais ? » (Jean Botéro, La plus vieille religion, folio, p. 193-194).
Des tablettes cunéiformes comportant des listes de souverains mésopotamiens qui nous ont été transmis depuis la cité d’Ur, d’Isin et de Larsa. La plus complète est le célèbre bloc d’Isin-Larsa écrit sur les quatre côtés par deux colonnes. Elle indique les souverains mésopotamiens depuis les origines, avant le déluge, jusqu’au XVIIIe siècle avant Jésus-Christ.
« Au contraire, Epigène, autorité particulièrement respectable, assure que chez les Babyloniens des observations astronomiques de 720 000 ans sont inscrites sur des briques cuites ; ceux qui réduisent au minimum cet espace de temps, Bérose et Critodème, l’évaluent à 490 000 ans. » (Pline l’ancien, histoires naturelles, Livre VII, LVII).
Bérose habitait la Mésopotamie, il était l’héritier d’un ancien savoir sumérien. Les briques cuites sur lesquelles étaient inscrites des observations astronomiques sur une période « fabuleuse » de sept cents cinquante mille ans sont les tablettes cunéiformes sumériennes sur lesquelles sont inscrite les listes des rois. Tombée dans l’oubli après Pline l’Ancien, elles ont été redécouvertes au XIXe siècle. En effet, la liste des rois comporte des durées de règne sur plusieurs centaines de milliers d’années. Ces règnes sont de nature astrologique, puisqu’ils correspondent aux ères astrologiques de la Grande Année. C’est de cela dont parle Pline et sa source Bérose. Les découvertes modernes sont venues confirmer les propos de l’historien romain.
A : « Les temps fabuleux ».
Les temps fabuleux dont parle Jean Botéro concernent une division du temps en trois niveaux.
Le chiffre soixante est le chiffre de base de la civilisation sumérienne. C’est le nombre d’Anu. Aujourd’hui encore, nous gardons une trace de cette unité 60 pour le temps. Une heure fait soixante minutes, une minute fait soixante secondes et ainsi de suite. Cela doit remonter sans aucun doute du temps de Sumer.
Un « soss » c’est soixante ans.
Un « ner« , c’est dix « soss » (six cents ans).
Un « sar », c’est six « ner » ou soixante « soss ».
Selon Bérose, le monde durerait douze fois douze « sars« , soit cent quarante quatre « sars« , soit encore cinq cent dix-huit mille quatre cents ans.
Douze comme le nombre de signes du zodiaque. Un « sar » pourrait donc correspondre à un signe du zodiaque. Douze « sars » équivaudraient donc à une grande année, c’est-à-dire au passage des douze signes astrologiques. Elle durerait, selon les textes sumériens, quarante-trois mille deux cents ans.
Le monde durerait douze grandes années. C’est pour cela qu’ils parlent de douze fois douze. Douze grandes années de douze « sars« .
Autre élément de grande importance. Le zodiaque fait trois-cent soixante degrés. Un « sar » fait trois mille six cents ans. Il y a un degré pour cent vingt ans. Mille deux cents ans pour un décan.
Je voudrais ici faire le lien avec l’astrologie mondiale. Depuis toujours et jusqu’à une époque récente, on considérait les conjonctions entre Jupiter et Saturne comme les Grandes Conjonctions qui marquaient les époques et rythmait l’histoire du monde. Or, les conjonctions Jupitero-saturniennes ont lieu tous les vingt ans… vous suivez mon regard.
Un « Soss » dure soixante ans, soit trois conjonctions Jupiter-Saturne. Ou plutôt, pour dire les choses autrement, toutes les trois conjonctions Jupiter-Saturne, nous changions de « Soss« .
Un « Ner« , c’est trente conjonctions Jupiter-Saturne.
Un « Sar« , c’est cent quatre-vingts conjonctions Jupiter-Saturne.
De même, une Grande Année fera deux mille cent soixante conjonctions.
Un signe astrologique de la Grande Année comportera cent quatre-vingts conjonctions.
Dans mon livre « Nostradamus et l’astrologie mondiale« , j’avais déjà remarqué une étonnante corrélation entre les ères astrologiques et les conjonctions Jupiter-Saturne, sans avoir encore découvert la théorie des âges du monde sumérienne. Cette découverte que je vous expose maintenant, me permettra sans aucun doute d’affiner ma propre théorie dans d’autres articles puis dans un livre.
C’est sous une forme différente que ce savoir sera transmise à la Grèce antique. C’est la Grande Année de Platon, fondée sur la précession des équinoxes et non sur les conjonctions Jupiter-Saturne. Il y a eu une sorte de dégradation de l’idée originale à travers le temps dont je ne parlerais pas dans cet article.
L’Antiquité Grecque gardera de la trame originale, l’idée d’une succession de périodes présidée par un signe astrologique qui se succède sur plusieurs millénaires. Oubliant le rôle joué par Jupiter et Saturne, en lui substituant un déplacement du point vernal sur le zodiaque.
B : La liste royale sumérienne.
Il faut distinguer les dynasties d’avant le déluge (1) de celle après le déluge (2).
1. Les dynasties d’avant le déluge.
La « liste royale » commence par cette phrase étrange.
« Après que la royauté descendit du ciel, elle alla à Eridug. ».
Ensuite, la liste présente cinq dynastie ayant régné dans cinq cités différentes :
- Dynastie d’Eridu.
- Dynastie de Bad-Tibira.
- Dynastie de Larak.
- Dynastie de Sippar.
- Dynastie de Shuruppak.
Le mythe des cinq cités et des cinq dynasties est un mythe fondateur que l’on retrouve un peu partout dans le monde. Par exemple en Irlande ou en Chine. Cela correspond à un centre et aux quatre éléments. Je travaille sur un article sur ce sujet, il sera publié dans les prochaines semaines. Il me reste à la peaufiner et à le corriger.
Voici la liste des rois avant le déluge.
211 800 ans se sont écoulés entre le premier roi et le déluge. Cela représente soixante-seize « sars« . Soixante-seize sars qui représentent un peu plus de six Grandes Années.
Diodore de Sicile parle lui de quatre cent soixante-treize mille ans entre les premières observations astrologiques et le règne d’Alexandre le Grand.
« Nous nous éloignerions trop de notre sujet, si nous voulions entrer dans tous ces détails ; il suffit d’être convaincu que les Chaldéens sont plus que tous les autres hommes versés dans l’astrologie, et qu’ils ont cultivé cette science avec le plus grand soin. Il est cependant difficile de croire au nombre d’années pendant lesquelles le collège des Chaldéens aurait enseigné la science de l’univers ; car depuis leurs premières observations astronomiques jusqu’à l’invasion d’Alexandre, ils ne comptent pas moins de quatre cent soixante-treize mille ans.« (Didore de Sicile, histoire universelle, II : 31)
Des durée qui peuvent paraître fabuleuse, pour reprendre l’expression de Jean Botéro. Elles ne peuvent s’expliquer que par la théorie des ères astrologiques. Un champ immense de recherches s’ouvre devant les chercheurs du futur pour retrouver un savoir perdu dans la nuit des temps. j’espère inspirer des jeunes gens, comme Jean Botéro et Jean Richer m’ont inspirer, pour trouver la clef de cette énigme passionnante.
Je ne tenterais pas, dans ce livre, d’identifier les signes correspondant aux différentes dynasties sumériennes. Il faudrait le faire dans le cadre d’un livre spécifique, que j’écrirais un jour, si Dieu me prête vie jusque-là, car le travail est immense.
2. Les dynasties d’après le déluge.
Sous le règne de Ziusudra, le dernier souverain de la liste, un déluge eut lieu.
« Après le Déluge, la royauté passa à Kish. »
La première dynastie post diluvienne est celle de Kish dite Kish I par les sumérologues.
Avant le déluge, les durées sont exprimées en « sars« , après le déluge, elles sont exprimées en années. Cela n’est pas le fruit du hasard, puisque Ziusudra lui-même (le Noé Sumérien) voit son règne exprimé en années.
En parlant de Noé, il étonnant de remarquer la même différence sur les âges des hommes entre ceux d’avant le déluge et ceux nés après le déluge. Plus nous nous éloignons du déluge et moins les hommes vivent longtemps, de la même manière que les dynasties et les rois sumériens sont moins longs, plus temps avance.